Résumé n°EP_33

Hépatite liée à l’alcool et hypertension portale sévère : une menace démystifiée pour la survie ?

K. Gebara*, L. Moulis, B. Riviere, S. Faure, H. Donnadieu, GP. Pageaux, J. Ursic Bedoya (Montpellier)

Introduction :
L’hypertension portale (HTP) est au premier plan du tableau clinique de l’hépatite liée à l’alcool (HA) symptomatique. Il n’est cependant pas établi si la sévérité de l’HTP a un impact pronostic dans l’HA. Le but de l’étude est d’évaluer l’impact de l’HTP sur la survie sans transplantation hépatique (TH) des patients hospitalisés pour HA symptomatique et de décrire l’histoire naturelle de cette HTP dans ce contexte. 

Patients et méthodes / ou matériel et méthodes :
Nous avons rétrospectivement inclus les patients hospitalisés pour HA symptomatique entre Janvier 2013 et Décembre 2021. Les patients inclus étaient majeurs et devaient avoir bénéficié d’une évaluation de leur HTP par mesure du gradient de pression veineux hépatique (GVPH) et/ou par gastroscopie. Nous avons exclu les patients transplantés hépatiques et les patients avec infection/saignement digestif incontrôlé ou défaillance multiviscérale à l’entrée. Nous avons défini l’HTP sévère par la présence de signes endoscopiques d’HTP et d’ascite ou un gradient de pression portale > 22 mmHg (cut off basé sur (1)). Le critère de jugement principal était la survie sans TH à 6 mois. 

 

Résultats :
129 patients ont été inclus. L’âge moyen était de 52 ans, 83% étaient des hommes. Les scores moyens de Maddrey, MELD et Glasgow alcoholic hepatitis score (GAHS) étaient de 60,1 (± 23,7), 25,4 (± 6,7) et 8,9 (± 1,7) respectivement. La médiane de survie sans TH était de 24,6 mois (IC95% [9,76 ; 52,44]. 57 patients (44 %) sont décédés et 32 (24 %) ont été transplantés. 11 patients (8 %) sont décédés dans le cadre d’une défaillance hépatique, seulement 2 (1,6 %) sont décédés d’une complication liée à l’HTP (syndrome hépato-rénal) mais aucun n’est décédé des suites d’une hémorragie digestive en lien avec l’HTP. L’HTP était sévère chez 93 patients (72 %), modérée chez 14 patients (10,8 %) et minime ou absente chez 22 patients (17 %). L’HTP sévère n’était pas significativement associée à la mortalité sans TH à 6 mois. En analyse multivariée, le seul facteur indépendant associé de manière significative au décès sans TH à 6 mois est le score de MELD (OR = 1,21, 95% CI [1,07 ; 1,37], p = 0.01). L’HTP semble régresser dans le temps avec à 6 et 12 mois, 23 et 20 % de patients avec HTP sévère respectivement contre 72 % à l’inclusion. Les patients avec HTP sévère à l’inclusion avaient des marqueurs de l’inflammation plus élevés, suggérant un profil d’HTP « inflammatoire » dans ce contexte.

Conclusion :
Il n’a pas été mis en évidence d’effet délétère de l’HTP sévère sur la survie sans TH à 6 mois. On note une évolution favorable fréquente de l’HTP à distance de l’épisode d’HA soulignant un phénomène dynamique réactionnel à un probable état inflammatoire et sans corrélation avec la sévérité de la défaillance hépatique. Cela contraste avec l’histoire naturelle de la cirrhose liée à l’alcool.

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflit d’intérêt

Références :
– D’Amico et al. J Hepatol 2006
– Rudler et al. J Hepatol 2015
– (1) Rincon et al. Aliment Pharmacol Ther 2008